Avoir du sens ou faire du sens?

Faire du sens ou avoir du sens

Ça n’a pas de sens de croire que ça fait du sens

Le français québécois est une variante riche et vivante de la langue française, façonnée par l’histoire, la culture et des siècles d’évolution linguistique. Bien qu’il s’apparente de façon intelligible au français européen, il a développé son propre ensemble d’expressions, d’idiomes et même de particularités grammaticales. Une bizarrerie linguistique courante qui fait souvent sourciller certaines personnes est l’utilisation du calque tiré directement de l’anglais to make sense, au lieu du français standard avoir du sens.

Cet anglicisme est largement utilisé au Québec, même par des locuteurs instruits ainsi qu’à la télévision, bien qu’il soit considéré comme incorrect en français formel. Pourquoi cette expression est-elle utilisée si souvent au Québec? Pourquoi cette erreur est-elle si répandue et d’où vient-elle? Examinons les origines, les raisons de l’utilisation et la perception qu’ont les gens de l’expression faire du sens en français québécois.

Quel est l’origine de faire du sens

L’expression est un emprunt direct à l’anglais, traduit littéralement de to make sense. Ce type d’emprunt linguistique, connu sous le nom de calque, se produit lorsque des locuteurs traduisent directement des expressions d’une langue à une autre sans tenir compte de la syntaxe ou de la grammaire naturelle. En français standard, l’expression consacrée est avoir du sens, ce qui signifie littéralement en anglais to have sense plutôt que to make sense.

La forte influence de l’anglais sur le français québécois n’est pas une surprise. En raison de facteurs historiques, géographiques et économiques, l’anglais et le français ont coexisté au Québec pendant des siècles. De nombreuses expressions anglaises se sont glissées dans le français québécois de tous les jours, parfois d’une manière qui n’est pas immédiatement perceptible par les locuteurs locaux. L’utilisation de la traduction mot à mot de to make sense est un exemple classique de ce phénomène, puisqu’il reflète étroitement l’expression anglaise, tant dans sa structure que dans son sens.

Avoir du sens ou faire du sens?

Pourquoi l’expression est-elle utilisée si souvent au Québec?

Plusieurs raisons expliquent pourquoi cet anglicisme est devenu si courant au Québec :

  1. Environnement bilingue : Bien que le Québec soit une province majoritairement francophone, l’anglais demeure une langue seconde pour de nombreux résidents. L’interaction constante entre les deux langues crée des opportunités d’influence interlinguistique, en particulier dans les affaires, les médias et la conversation de tous les jours.
  2. Construction logique : Pour bien des gens du Québec, faire du sens « semble » adéquat parce que « faire » est couramment utilisé dans d’autres expressions françaises qui décrivent la création ou la production de quelque chose (par exemple, faire une erreur). Il semble ainsi s’agir d’une structure naturelle et logique, même si elle ne suit pas les règles traditionnelles de la grammaire française.
  3. Diffusion générationnelle et sociale : Avec le temps, les erreurs couramment utilisées ont tendance à se solidifier dans une langue, surtout lorsqu’elles sont largement comprises. Les jeunes générations adoptent souvent ces expressions de leurs parents, de leurs enseignants ou des médias, ce qui renforce leur utilisation dans différents groupes sociaux.

Perception qu’ont les gens de ce calque

Alors que ce calque est largement compris au Québec, il est considéré comme incorrect dans le français formel et écrit. De nombreux puristes de la langue et éducateurs préconisent l’utilisation d’avoir du sens, car elle est conforme aux règles grammaticales du français et est universellement comprise dans le monde francophone.

En revanche, les francophones de France trouvent souvent que cette expression est étrange, voire incorrect. Ils la considèrent comme un anglicisme, une erreur qui ne sonne pas naturel à leurs oreilles. Dans un contexte professionnel, académique ou formel, l’utilisation d’avoir du sens est essentielle pour assurer une communication claire et correcte.

Malgré cela, faire du sens reste profondément ancré dans le français québécois et n’est pas près de disparaître. C’est l’une des nombreuses expressions qui témoignent de l’identité linguistique de la province et de sa relation complexe avec le français et l’anglais.

L’importance de préserver un français correct

La langue évolue et les emprunts linguistiques font naturellement partie de cette évolution. Cependant, il est essentiel de conserver une forme de français standard, en particulier dans les milieux professionnels et éducatifs. Alors que cet emprunt est largement accepté dans le langage courant, l’utilisation d’avoir du sens garantit la clarté et l’exactitude de la langue lorsque l’on communique avec des francophones hors du Québec.

Pour éviter cette erreur courante, il ne suffit que de remplacer faire par avoir du sens dans nos conversations quotidiennes. Ce petit ajustement permet non seulement de préserver l’intégrité de la langue française, mais aussi d’éviter les malentendus dans les contextes internationaux.

Conclusion

L’expression faire du sens est un exemple fascinant de l’influence des langues les unes sur les autres, en particulier dans les régions bilingues comme le Québec. Alors que cet anglicisme s’est profondément ancré dans le parler local, il demeure inadéquat dans le français standard. Comprendre les raisons de ce phénomène linguistique permet d’apprécier le caractère unique du français québécois tout en soulignant l’importance d’un usage correct de la langue dans les situations formelles. Alors, la prochaine fois que vous entendrez cet emprunt, rappelez-vous que même si cela sonne bien au Québec, ça n’a pas de sens de croire que ça fait du sens!

Pour plus d’informations, veuillez vous référer à la Vitrine linguistique de l’Office québécois de la langue française où l’on traite de cet emprunt déconseillé.

Ne manquez pas notre prochaine publication où nous discuterons des avantages de travailler avec une agence de traduction plutôt que d’avoir recours à l’équipe des services linguistiques de sa propre entreprise.

Posted on avril 1, 2025 in Anglicismes, Calques, Domaine de la traduction, Écriture, French language

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